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(CP) Les droits des personnes trans sont une urgence !

Communiqué de presse du 29 février 2016


Aujourd’hui certains tribunaux de grande instance continuent de refuser les changements d’état civil sans stérilisation, et ce, à la demande du Ministère public, condamnant les personnes trans aux discriminations et à la précarité en l’absence de papiers conformes à leur genre. Nous avons besoin d’une loi pour mettre un terme à ces pratiques, une loi qui ne laisse pas le sort des personnes trans aux mauvais soins des procureurs !

Le 19 février 2015, le tribunal de grande instance de Versailles déboute A. au motif que sa demande est « prématurée » puisqu’elle n’a pas subi « d’opération chirurgicale irréversible de suppression des marqueurs extérieurs de son sexe d’origine » alors qu’elle apporte un certificat d’un médecin qui précise que certaines transformations liées à son hormonothérapie sont « irréversibles ».

Le 22 décembre 2015, le tribunal de grande instance de Senlis déboute B. de sa demande de changement d’état civil au motif que « les pièces produites ne sont pas suffisantes pour justifier l’irréversibilité du processus de changement de sexe et que cette demande est prématurée ». Il faut néanmoins relever l’hypocrisie du Ministère public qui avait dans un premier temps, le 18 septembre 2015 émis un avis favorable à l’écrit, alors qu’au moment de l’audience le Procureur, n’hésitant pas à aller contre cet avis auquel il est censé être tenu, a finalement émis un avis oral défavorable.

Le 19 janvier 2016, le tribunal de grande instance de Metz déboute C. de sa demande de changement d’état civil au motif que « l’hystérectomie et l’annexectomie bilatérale ne sont pas envisagées » et que « la transformation de l’apparence réalisée à ce jour n’est pas irréversible, n’ayant été obtenue que par un traitement hormonal et une mammectomie. »

Le 18 mars 2015, dans le recours de S. c/ France devant la Cour européenne des droits de l’Homme, le gouvernement a soutenu les arrêts de la Cour de cassation du 7 juin 2012 qui stipulent qu’il faut « établir le caractère irréversible de la transformation de son apparence » pour obtenir la modification de la mention du sexe à l’état civil et précise que la notion d’irréversibilité « fait référence non à des critères juridiques mais à des critères médicaux ».

Force est de constater que les juges du TGI de Versailles s’arrogent une expertise médicale qu’ils ne possèdent pas et que les juges du TGI de Senlis et de Metz interprètent de façon très stricte la jurisprudence de 1992 et la notion d’irréversibilité de la Cour de cassation en 2012 en attendant une stérilisation par l’intermédiaire de chirurgies génitales. De plus le Ministère public s’ingénue à inventer de nouvelles façons d’empêcher les personnes trans d’accéder au changement d’état civil soit en émettant des avis favorables à l’écrit et ensuite en se dédisant à l’oral lors de l’audience soit en multipliant les critiques sur la forme de la procédure. Dans tous les cas le Ministère public se hisse tel un rempart contre le droit des personnes trans, contre les droits humains.

Le 29 septembre 2015, les députés socialistes dont M. Le Roux, Mme. Crozon, Mr. Binet, Mme. Delaunay, Mme. Lemorton, ont déposé une proposition de loi – n° 3084 – relative à la modification du sexe à l’état civil laissant au Ministère public tout pouvoir sur le changement d’état civil des personnes trans. Encore une fois cela laisse tout pouvoir à une institution qui a prouvé sa volonté de lutter contre les droits des personnes trans dans de trop nombreux dossiers de changement d’état civil.

Nous rappelons que dans l’enquête rédigée par Arnaud Alessandrin et Karine Espineira intitulée La Transphobie en Juillet 2014, 85% des 281 répondant-e-s déclarent avoir déjà subi un acte transphobe, que plus de la moitié n’a pas changé son état civil et autant déclarent avoir subi une discrimination liée à un changement d’état civil inchangé. La transphobie a lieu dans tous les domaines de la vie des personnes trans, que ce soit dans la sphère privée, amicale, familiale, professionnelle, publique et sur Internet. 28% déclarent avoir perdu un travail à cause de leur transidentité, 64% déclarent avoir subi de la transphobie du corps médical. Suite à un acte ou propos transphobe seulement 3,3% des répondant-e-s ont porté plainte.

Les droits des personnes sont une urgence et c’est pourquoi nous demandons aux députés de proposer et de voter une loi pour un changement d’état civil simple, rapide, déjudiciarisé et démédicalisé.

Signataires :
Acthe
Chrysalide

1: http://www.assemblee-nationale.fr/14/propositions/pion3084.asp