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[CP] CEDH - Recevabilité de 3 dossiers

Après la condamnation de la Turquie pour stérilisation des personnes trans le 10 mars 2015, c’est au tour de la France de devoir répondre devant la Cour européenne des Droits de l’Homme des conditions imposées pour le changement d’état civil.

Communiqué de presse du 30 Mars 2015

Au bout de 8 années de procédure juridique, dans une lettre du 25 mars 2015, la CEDH fait part à S. que "à la suite d'un examen préliminaire de la recevabilité de la requête susmentionnée le 18 mars 2015, le président de section à laquelle l'affaire a été attribuée a décidé, en vertu de l'article 54 $ 2 b) du règlement de la Cour, de donner connaissance de la requête au gouvernement français". Cette requête sera instruite simultanément avec les deux autres recours actuels sur le changement d'état civil (CEC) portés par des françaises devant la Cour. La France fait face actuellement à 3 dossiers sur le CEC devant la CEDH.

En ce qui concerne les griefs, S. invoque les articles 6 et 8 de la Convention pour dénoncer que la justice française avait commis une erreur manifeste d'appréciation en concluant que "S. n'avait pas apporté la preuve d'une transformation irréversible de son apparence". S. invoque l'article 8 de la Convention pour dénoncer que la France ne possède pas de moyens clairs et accessibles pour le CEC. S. invoque les articles 3 et 8 de la Convention pour dénoncer que la justice française conditionne le CEC à des expertises médicales intrusives et dégradantes. Enfin S. invoque les articles 3 et 8 de la Convention pour dénoncer que le droit français conditionne le CEC à une opération de réassignation impliquant une stérilité irréversible.

Dans le cadre de la procédure de S. c. France, la Cour a posé une série de questions au gouvernement français à laquelle il doit répondre avant le 15 juillet 2015. La Cour semble s'intéresser particulièrement à la notion d'irréversibilité, en effet une des questions est la suivante : "le « caractère irréversible de la transformation » de l'apparence implique-t-il la stérilité".

Nous rappelons que le 10 mars dernier la CEDH condamnait la Turquie au motif que l'état défendeur refusait l'accès à l'opération de réassignation sexuelle à Y.Y. et exigeait sa stérilisation. Dans l'arrêt, la cour a réitéré que le "droit au développement personnel et à l’intégrité physique et morale ne saurait être considérée comme une question controversée exigeant du temps pour que l’on parvienne à appréhender plus clairement les problèmes en jeu" et "qu’il peut y avoir une atteinte grave au droit au respect de la vie privée lorsque le droit interne est incompatible avec un aspect important de l’identité personnelle".

Pendant ce temps, le Tribunal de Grande Instance de Versailles persiste à exiger la preuve d’une opération de réassignation sexuelle ayant fait disparaître toutes les "marques extérieurs" du sexe d’origine pour ordonner un changement d’état civil. Le Bureau d’aide juridictionnel de Paris refuse d’accorder son aide aux personnes n’ayant pas subi d’opération de réassignation sexuelle. Pire encore, certains procureurs de la République multiplient les critiques sur la forme de la procédure, rallongeant de plusieurs mois les délais pour le ou la requérant-e.

La France ayant jusqu’au 15 juillet 2015 pour répondre à la Cour sur l’irréversibilité impliquant la stérilisation, allons-nous assister à une clarification et une simplification de ces procédures de CEC par le gouvernement ?